Rencontre de la lumière
La vie d’Hildegarde de Bingen (1098-1179), est elle aussi, marquée par la lumière, ses couleurs et ses ombres. Et cela jusqu’au moment de sa mort où, selon la légende, une lumière radieuse serait apparue dans le ciel. Mais plus encore, la lumière est la source, l’étincelle et le feu de la vie qui alimentent l’ensemble de son oeuvre.
Sa première rencontre avec la Lumière la foudroie comme une éclair et transforme soudainement sa vie, jusqu’alors effacée: «En l’an 1141 de l’Incarnation de Jésus-Christ, quand j’avais 42 ans et 7 mois, descendit du ciel une Lumière ardente aux lueurs étincelantes qui me traversa l’esprit et m’embrasa la poitrine. Et soudain s’ouvrit à moi le sens des Écritures…» Elle reçut ce message: «Ecris ce que tu vois et ce que tu entends!» Le passage de la Lumière en elle ainsi que les dons appropriés à cette apparition ont valu à Hildegarde de Bingen son nom de visionnaire et de prophétesse. Qui était cette femme qui attira l’attention des ses contemporains et aujourd’hui encore celle de ceux qui cherchent l’absolu, le salut? Cela vaut-il la peine de connaître sa vie, son œuvre, de les approfondir? Est-il possible de faire un bond de 900 ans en arrière sans plonger dans l’abîme de l’histoire? Faut-il , pour comparer le premier et le troisième changement de millénaire, utiliser d’autres critères: manque de foi, d’orientation, de stabilité générale ainsi que perte croissante de l’autorité de l’Église? Sur Hildegarde de Bingen, nous ne possédons que très peu de détails historiques jugés fiables. Elle est née en 1098, issue d’une famille de Bermersheim appartenant à la haute noblesse franque. D’après sa «vita», biographie de l’époque, Hildegarde, dixième enfant d’une famille nombreuse va – comme il était courant autrefois – à 14 ans, être confiée pour son éducation et son instruction, à Jutta de Sponheim qui vit recluse dans un couvent adjacent au monastère de Disibodenberg. Hildegarde va donc être, très tôt et de manière prépondérante, imprégnée du rythme de vie bénédictin alternant prière et travail, étude et lecture spirituelle, vie communautaire et solitude. Jutta meurt en 1136 et Hildegarde prend sa place à la tête d’une petite communauté conventuelle qui s’était développée peu à peu, au fil des années.
Jusqu’à sa 41ème année, Hildegarde s’applique assidûment aux tâches quotidiennes d’un couvent sans oublier pour autant d’enrichir ses connaissances et de se doter progressivement d’une profonde culture. Bien qu’elle répétât souvent dans ses écrits, plus tard, qu’elle n’était pas instruite – probablement du fait qu’elle n’avait pas reçu un enseignement formel des disciplines classiques telle la dialectique et la grammaire – Hildegarde possédait néanmoins de vastes connaissances de la Bible, en théologie, en philosophie et en sciences naturelles. C’est surtout la richesse des Écritures qu’elle découvre dans la liturgie et la Règle de Saint Benoît comme dans les Lectures des Pères de l’Église et des Pères du désert qui vont devenir pour elle une source intarissable d’inspiration et constituer la base de son œuvre entière.
Son savoir et sa sagesse, ses facultés de perception, son érudition mêlée d’inspiration vont s’unir en elle en symbiose.